Histoire et anthropologie de la mort
Date(s) : du 9 février 2023 10 h 00 au 10 novembre 2023 17 h 00
Lieu : salle Georges Duby, MMSH, Aix en Provence
Organisateur(s) / trice(s) à TELEMMe :
Partenaires :
- ADES
PRÉSENTATION
Le séminaire inter-laboratoire Aix-Marseille Université Histoire et anthropologie de la mort, organisé conjointement par Elisabeth Anstett (CNRS, Ades) et Anne Carol (Aix-Marseille Université, Telemme) reprend ses activités. Le programme pour 2023 prévoit deux journées d’études et un colloque (pour plus de détails voir : https://necrolog.hypotheses.org/a-propos-du-seminaire-histoire-et-anthropologie-de-la-mort-amu/2023-2 .
Le programme pour 2023 prévoit deux journées d’études et un colloque (pour plus de détails voir : https://necrolog.hypotheses.org/a-propos-du-seminaire-histoire-et-anthropologie-de-la-mort-amu/2023-2 .
Participer à la réunion via le lien Zoom suivant : https://univ-amu-fr.zoom.us/j/84021943572?pwd=bWttTER0bmF2R2ppYlVsNjZPRkI0UT09
Dans tous les cas, JE ou colloque, ces séances auront lieu en hybride : vous êtes bienvenus sur site (merci de nous prévenir : anne.carol@orange.fr), et un lien de connexion Zoom sera créé également pour ceux qui souhaitent participer en distanciel.
PROGRAMME
9 février: Marchandisation du corps et questions de nécro-économie
Matinée : 10h-12H30
Anne Carol, est professeur d’histoire contemporaine à Aix-Marseille Université (France) et membre du laboratoire TELEMMe (Maison Méditerranéenne des Sciences de Homme). Elle travaille sur l’histoire culturelle et sociale de la médecine et des médecins, l’histoire du corps et l’histoire des sensibilités et des pratiques face au cadavre en France au XIXe et XXe siècles. Parmi ses dernières publications figurent La mise en pièces de Gambetta. Autopsie d’un corps politique (2022), et L’embaumement, une passion romantique (2015).
Le corps est-il une marchandise ? Embaumement et dissection, France, années 1830. Au début du XIXe siècle se développe en France la pratique de l’embaumement ; à propos des modalités de sa commercialisation, une controverse se développe devant les prétoires, entre le fondateur de l’embaumement moderne, J. -N. Gannal et un de ses concurrents. Cette polémique pose la question de la possible marchandisation du corps, pour la refuser. Pourtant, dans des contextes sociaux et techniques différents, au même moment, des cadavres alimentent une économie routinière, comme celle de l’approvisionnement des amphithéâtres de médecine. C’est cette tension qui sera explorée dans cette communication.
Cristina Ciancio, est Professeur d’Histoire du droit médiéval et moderne au Département de Droit et Economie de l’Università degli Studi del Sannio à Benevento (Italie). La Pr. Ciancio a été à plusieurs reprises chercheuse invitée au Max-Planck Institut für europäische Rechtsgeschichte de Frankfurt am Main, et, en 2011, Faculty Visitor à la University of Cambridge Faculty of Law (UK), Visiting Fellow au Corpus Christi College et Bye Fellow au Robinson College. Professeur invitée en 2022 à l’Université de Toulouse 1 Capitole, elle a donné une série de leçons sur « Droit, peur et médecine et le défis du corps mort. Chemin d’histoire du droit entre France et Italie » dans le cadre du Master 2 Recherche d’Histoire du droit et des institutions.
Ni personne, ni chose. Dimension juridique du cadavre et problèmes de marchandisation (XIX-XXe siècles). D’un point de vue juridique, le cadavre est un rébus. Il ne s’agit plus d’un sujet, mais, en même temps, il n’est pas complètement considéré comme un quelconque résidu de vie organique. Les systèmes juridiques ont, au cours des deux derniers siècles, construit la protection du corps mort en intégrant les risques de sa marchandisation. Au fil du temps, cadavre a été confirmé comme étant res extra commercium. Cela s’est fait dans un cadre de valeurs qui a dû inévitablement se heurter aux changements culturels et aux exigences scientifiques en constante évolution.
Après-midi : 14h-16h30
Pascale Trompette et Alèxe Duvaut est doctorante en science politique à l’Institut d’Études Politiques de Bordeaux, membre du Centre Émile Durkheim et de l’UMR Pacte. Elle travaille sur la fabrique des politiques publiques autour de la mort, et ses interactions avec les professionnels publics et privés à l’échelle territoriale et nationale. Pascale Trompette est sociologue, directrice de recherche au CNRS et membre de l’UMR Pacte. Elle a conduit des recherches sur le marché funéraire en France, sur sa transformation depuis la Révolution Française à nos jours à travers les interactions entre État, organisations intermédiaires, entreprises et citoyens.
Marchandisation et formation des prix dans l’histoire des funérailles (19e-21e) : Depuis la loi Sueur abrogeant le monopole communal, le marché funéraire est entré dans une nouvelle ère : montée de l’assurance obsèques, guerre des grands groupes, privatisation de la gestion des crématoriums, flambée des prix. S’agit-il d’une nouvelle étape dans la « marchandisation » des funérailles ? A partir d’une perspective historique, nous proposons de questionner la notion de marchandisation en caractérisant les différentes constructions politiques et juridiques des relations marchandes autour du culte des morts au fil de l’évolution de ce marché. Nous nous saisirons de la question de la formation des prix comme une clé d’entrée privilégiée pour saisir les formes de commerce auxquelles ces constructions politiques ont donné lieu.
Céline Lafontaine, professeure de sociologie à l’Université de Montréal (Canada). Ses travaux portent sur les enjeux épistémologiques, économiques, sociaux et culturels des technosciences. Elle s’intéresse plus particulièrement à la question de la bioéconomie du corps humain et au processus de bio-objectivation propre à la civilisation in vitro. Elle a notamment publié Le corps-marché. La marchandisation de la vie humaine à l’ère de la bioéconomie (Seuil, 2014) et Bio-objets. Les nouvelles frontières du vivant (Seuil, 2021).
La cryopolitique ou la vie sans fin des bio-objets : Issus de la culture in vitro, les bio-objets (lignée cellulaires, cellules souches, gamètes, etc) possèdent des caractéristiques particulières, notamment celle de pouvoir être congelés et conservés indéfiniment. En fait, les cellules congelées se rattachent à un état liminal entre la vie et la mort, celui de la vie latente. À partir du concept de cryopolitique, on verra comment cette vie latente remet en question les frontières matérielles et symboliques propres à la mortalité humaine.
Cet événement aura lieu en mode hybride (cf lien de connexion ci-dessu).
Vous êtes bienvenus à la MMSH (merci de nous prévenir de votre venue pour que nous puissions organiser la logistique de ces séances en conséquence : anne.carol@orange.fr).
Cette manifestation, soutenue par l’Observatoire des Pratiques Interdisciplinaires coordonné par la Mission Interdisciplinarité(s) d’AMU, bénéficie dans ce cadre d’une aide de l’État gérée par l’Agence Nationale de la Recherche au titre du programme d’Investissements d’avenir portant la référence ANR-20-IDES-0003
4 avril : Cadavre et crémation
Matinée : 10h-12H30
Gaëlle Granier, L’apport de l’archéologie à la compréhension des pratiques funéraires et mortuaires anciennes
L’usage de la crémation comme mode de traitement du corps mort n’est pas un fait récent. Son histoire se confond avec celle des civilisations. L’inhumation comme la crémation sont donc utilisés de tous temps et dans toutes les régions, en alternance ou en coexistence. L’archéologie, par une approche pluridisciplinaire impliquant notamment anthropologues et anthracologues, permet de restituer – au moins en partie – la chaine opératoire des temps funéraires et post-funéraires impliquant la crémation du corps. Nous verrons, à travers des exemples archéologiques de divers contextes culturels et chronologiques, quelles problématiques se posent aux archéologues face à une structure de crémation (qu’elle soit funéraire ou mortuaire) et dans quelles mesure l’archéologie permet de restituer les gestes effectués, les pratiques adoptées et leur potentielle signification symbolique, culturelle, sociétale ou religieuse.
- Granier est archéothanatologue, chargée de recherche au CNRS. Ses recherches visent à caractériser les sociétés anciennes par les prismes des pratiques funéraires et mortuaires. Le cœur de ses problématiques de recherche s’attache à l’évolution de la conception de la Mort et de la gestion des morts à travers une approche interdisciplinaire, durant l’Antiquité romaine (avec un focus sur la co-évolution villes-occupations funéraires) et plus récemment l’âge du Fer.
Romain Fathi, La tentation crématoire. Les innovations et expérimentations crématoires de l’Armée française en Première Guerre mondiale
Cette communication s’arrête sur plusieurs tests crématoires menés au sein ou en périphérie de l’Armée française lors de la Première Guerre mondiale. Elle s’appuie sur les travaux préliminaires de Vincent Viet et s’attache à comprendre pourquoi la crémation n’a pas été retenue pour l’élimination des corps du champ de bataille et l’assainissement de ce dernier. Elle met en lumière la grande difficulté éprouvée par les différentes armées du conflit à gérer l’immense volume de corps d’hommes et d’animaux produits par le conflit. Au-delà du langage commémoratif et glorifiant du temps de guerre, coût, efficacité, rendement, propreté sont autant de paramètres qui ont dessiné les politiques de traitement des cadavres en temps de guerre dans l’Armée française et qui ont pendant un court moment conduit vers une tentation crématoire.
- Fathi est Senior Lectureren histoire à l’université Flinders en Australie ainsi que Chercheur Associé au Centre d’Histoire de Sciences Po. Ses travaux s’organisent autour de trois grands axes de recherche : les processus commémoratifs et de mémorialisation de la Première Guerre mondiale ; le traitement des cadavres militaires lors de ce conflit ; le rôle de la Ligue des Sociétés de la Croix-Rouge dans l’évolution de la Croix-Rouge internationale. Un aperçu de ses travaux peut être consulté sur https://romainfathi.com/academic-works.
Après-midi : 14h-16h30
Silvia Romio Corps, crémation et pandémie : la « logistique des corps » dans le système de crémation des morts par Covid à Bergame (Italie du Nord)
Pendant la première phase de la pandémie de 2020, la question de la « logistique des corps » dans une situation d’urgence a été au cœur des activités des pompes funèbres locales. La convergence entre la volonté des parents endeuillés d’incinérer le corps de leur défunt et la conviction que la crémation était la réponse la plus adaptée dans une situation épidémique, a conduit le système de crémation à Bergame (ainsi qu’à Milan) dans l’impasse à la mi-mars 2020. Cette situation résulte de l’écart entre le nombre excessif de cercueils accumulés et les possibilités offertes par le système public de crémation. La fermeture des centres de crémation ajoutée à l’intervention rapide de l’armée pour mettre en place une « logistique des corps » massive, ont fini par être les éléments clés du scénario de la pandémie en Italie et dans le monde, déclenchant une série de réflexions sur la morale, l’éthique et les droits des morts.
- Romio est sociologue, chercheuse associée auCentre d’Études Politiques et Sociales- Développementde l’Université catholique de Louvain (Belgique). Titulaire d’un doctorat d’études politiques de l’École des Hautes Études en Sciences Sociales de Paris (2017), Silvia Romio est spécialisée en ethnologie amérindienne, en anthropologie de la mémoire de violence et de la mort. En 2021, elle a été chercheuse associée au Centre Max Weber de l’Université de Lyon, et membre du projet de recherche ANR (CNRS-FNS) Cofuneraire – construire une réponse funéraire en contexte de pandémie du Covid19. Dans ce cadre, elle a réalisé une enquête ethnographique sur le quotidien des agences funéraires dans deux régions du nord Italie (Veneto et Lombardie) pendant la pandémie
Eloi Ficquet, La crémation funéraire au défi de la transition énergétique : en quête de solutions techniques et d’éclairages anthropologiques.
Cette présentation retracera les premières étapes d’une réflexion interdisciplinaire en cours entre une équipe en ingénierie énergétique et une équipe en sciences humaines pour penser la possibilité de nouveaux dispositifs de crémation qui puissent à la fois réduire la consommation énergétique de cette pratique et concevoir des édifices architecturaux qui tiennent compte des insatisfactions exprimées par les familles en deuil sur les conditions cérémonielles auxquelles elles font face.
- Ficquet est maître de conférences à l’Ecole des hautes études en sciences sociales (Campus de Marseille) et membre du CéSor (Centre d’études en sciences sociales du religieux). Anthropologue et historien, ses travaux portent sur les sociétés de la Corne de l’Afrique. Dans des situations contemporaines et historiques – multiculturelles et multilingues – il cherche décrire et comprendre les interactions entre les organisations politiques, les groupements territoriaux identitaires et les affiliations religieuses. Il interroge en particulier les avancées de la modernité, qui ont impliqué de multiples formes d’adhésion ou de rejet.
Cet événement aura lieu en mode hybride (cf lien de connexion en tête d’annonce).
Vous êtes bienvenus à la MMSH (merci de nous prévenir de votre venue pour que nous puissions organiser la logistique de ces séances en conséquence : anne.carol@orange.fr).
Un colloque international et interdisciplinaire se tiendra les 9 et 10 novembre à la Maison Méditerranéenne des Sciences de l’Homme (Aix-en-Provence) autour du thème : Le corps des pauvres (titre provisoire).
Un appel à communication circulera à partir de la fin du mois de janvier.