Séminaire
Date(s) : du 17 janvier 2024 9 h 30 au 17 janvier 2024 12 h 00
Lieu : salle Georges Duby, MMSH, Aix en Provence
Organisateur(s) / trice(s) à TELEMMe :
Groupe(s) organisateur(s) :
PROGRAMME
Isabelle RENAUDET et Damien BOQUET (AMU – TELEMMe) – Introduction
• Ami NAGAI (AMU – TELEMMe)
La castration : entre médecine illégale et mode de vengeance
La castration est sévèrement punie par les Codes pénaux français de 1791 et de 1810. Une soixantaine d’affaires sont jugées en matière criminelle de la fin du XVIIIe siècle au XXe siècle.
À partir des sources médicales et judiciaires, nous nous intéressons au motif de cette incrimination spécifique ainsi qu’à l’application réelle de la loi.
Soucieux de reconstruire un savoir médical et de monopoliser le métier, les médecins diplômés dénoncent la castration pour guérir les hernies inguinales pratiquée par les empiriques jusqu’au XVIIIe siècle. L’hostilité contre les castrats reflète également la montée de l’intolérance envers l’ambiguïté du sexe. Les intérêts scientifiques rejoignent l’ambition des législateurs révolutionnaires préoccupés de protéger la virilité, considérée comme une force constituante d’une nation nouvelle. Si le régime vise à l’origine à punir les castrations exercées pour le motif chirurgical ainsi que pour le motif artistique, ce sont toutefois les cas des vengeances interpersonnelles qui restent les plus visibles dans les dossiers judiciaires. La castration est perpétrée dans diverses situations : les drames passionnels entre les amants ou
les époux, les conflits de voisinage, les mauvais termes dans un milieu professionnel ou encore la violence portée par un parent sur son enfant.
Punie comme un exercice illégal de la médecine jusqu’au XVIIIe siècle, la castration représente un moyen ultime de se venger des humiliations ou de punir l’infidélité au XIXe siècle.
• Damien BOQUET (AMU – TELEMMe)
Hermaphrodisme, homosexualité et transgression de genre : les amours contrariées de Laurence et Jeanne
Une lettre de rémission (grâce royale), datée de novembre 1405, nous renseigne sur les relations amoureuses et sexuelles entre deux paysannes, Laurence et Jeanne, qui commencent par une séduction, se poursuivent par une emprise et se terminent par une tentative de viol de la plus âgée sur la plus jeune. Le comportement masculin de Jeanne et certaines formulations déroutantes du texte ont cependant conduit les historiens à identifier à tort Jeanne comme une « hermaphrodite parfaite », dotée d’un pénis fonctionnel. Comment une telle confusion historiographique a-t-elle été possible ? Pourquoi le texte ne fait-il aucune référence au « crime sodomite » qui constitue cependant le motif de l’accusation ? En quoi Jeanne agit-elle comme un homme dans la relation amoureuse ? Ces questions guideront notre réflexion sur ce document exceptionnel, qui constitue l’un des très rares cas de lesbianisme conservés dans les archives judiciaires médiévales.