C’est avec tristesse et émotion que la direction et l’ensemble des membres de TELEMMe ont appris le décès le 15 janvier 2023 de Noël Coulet, professeur émérite d’histoire médiévale à l’université de Provence, devenue Aix-Marseille université, et membre de notre unité depuis sa création.
TELEMMe et plus largement la communauté des historiens perdent avec Noël Coulet un grand chercheur, actif jusqu’à ses derniers jours, publiant inlassablement le fruit de ses recherches et directeur de la revue Provence historique depuis 1980.
Nous publions ci-dessous les témoignages et évocations du parcours du professeur Noël Coulet auquel Laure Verdon, Régis Bertrand, Jean-Paul Boyer et Gérard Chastagnaret rendent hommage. Ses obsèques ont eu lieu le samedi 21 janvier au temple protestant d’Aix-en-Provence.
Laure Verdon
Chères et chers collègues
Les deux très beaux portraits de Noël Coulet dressés par Jean-Paul Boyer et Régis Bertrand disent bien le respect et l’admiration voués au professeur, mais aussi l’amitié sincère que ses élèves et collègues portaient à l’homme.
L’image de Noël Coulet est intrinsèquement liée au département d’Histoire de l’université de Provence, puis d’Aix-Marseille, où il fut l’assistant de Georges Duby au début des années 1960, qu’il dirigea, et au sein duquel il contribua à donner aux études médiévales un rayonnement important. Le cours qu’il anima pendant de longues années, en compagnie de Louis Stouff, sur la France et l’Angleterre durant la guerre de Cent ans, en est un parfait exemple. La pédagogie qui y était déployée, l’attention portée aux pratiques tout autant qu’ aux idéologies alliée à une analyse minutieuse des sources, sont pour beaucoup dans la transmission d’un vrai goût pour le Moyen Âge et à l’origine de nombre de vocations de médiévistes, dont je peux témoigner à titre personnel.
Avec Noël Coulet, il me revient en mémoire le temps où la recherche en histoire de la Provence, entre autres, se faisait dans les sous-sols de la faculté, au sein du GDR Méditerranée. Lorsque la Maison Méditerranéenne des Sciences de l’Homme vit le jour, au Jas de Bouffan, en 1998, Noël Coulet participa activement au déménagement des locaux du GDR, qui fut aussi un véritable transfert de la mémoire du Centre d’études des sociétés méditerranéennes qu’avait fondé Georges Duby à Aix en 1960. C’est grâce à Noël Coulet, en effet, que les archives du professeur Duby conservées à Schuman purent rejoindre les locaux de TELEMMe.
Ses anciens étudiants, ses collègues et amis historiens, historiens de l’art, archéologues, linguistes, littéraires, tous ceux qui l’ont connu et côtoyé à la faculté des Lettres d’Aix, sont aujourd’hui profondément attristés et se joignent au département d’Histoire et au laboratoire TELEMMe pour adresser à son épouse, à sa famille et à ses proches, leurs plus sincères condoléances.
Laure Verdon, pour le département d’Histoire et l’UMR TELEMMe
Régis Bertrand
COULET Noël, né à Cogolin (Var), 4 octobre 1932, historien.
Descendant par sa mère des Parli, fabricants des célèbres calissons d’Aix, Noël Coulet a fait ses études à la faculté des lettres d’Aix, a été reçu à l’agrégation en 1956, a été successivement nommé aux lycées de Tournon puis d’Aix (Mignet). Il a fait ensuite toute sa carrière à l’Université de Provence, chargé de cours en 1960, assistant en 1963, maître-assistant en 1968, chargé d’enseignement en 1971, professeur d’histoire du Moyen Âge, 1980-1998. N. Coulet a consacré à la ville d’Aix une thèse magistrale qui étudie la crise puis le relèvement de la capitale de la Provence aux XIVe et XVe siècles. Devait suivre un nombre considérable de travaux qui embrassent tous les aspects de la Provence de ce temps, de l’histoire économique et sociale à l’histoire religieuse et culturelle, sous-tendus par une exceptionnelle connaissance des espaces, des hommes et des archives à la fin du Moyen Âge. Par ses écrits, son enseignement, ses séminaires, ses directions de thèses, N. Coulet a joué un rôle de premier plan dans le renouvellement international des connaissances sur la monarchie capétienne-angevine, l’étude du judaïsme provençal, le développement franco-canadien des recherches sur la Haute-Provence médiévale. Directeur depuis 1980 de Provence Historique, il en a fait une des principales revues d’histoire régionale. Son Histoire de la Provence rédigée en collaboration avec M. Agulhon, fruit de leur enseignement commun, est régulièrement rééditée.
- Noël Coulet a été membre du conseil et président du forum des relations œcuméniques de la Fédération protestante de France et il a présidé la commission académique de l’Institut protestant de théologie.
Bibl : N. Coulet, Aix-en-Provence. Espace et relations d’une capitale (milieu XIVe s-milieu XVe s.), Aix, Public. de l’Université de Provence, 1988, 2 vol. M. Agulhon et N. Coulet, Histoire de la Provence, Paris, PUF, col. « Que sais-je ? », dern. éd., 2001. M. Aurell, J.-P. Boyer, N. Coulet, La Provence au Moyen-âge, Aix, Public. de l’Université de Provence, 2005, [N. Coulet, Rites, histoires et mythes de Provence, Aix, PuP, 2012 (recueil d’articles), N. Coulet et Florian Mazel dir., Histoire d’Aix-en-Provence, Rennes, PuR, 2020. Il venait de diriger « Mélanges en l’honneur d’Élisabeth Sauze », Prov. Hist. 272, 2022].
« De Provence et d’ailleurs. Mélanges offerts à Noël Coulet », Provence Historique, t. XLIX, fasc. 195-196, 1999.
Jean-Paul Boyer
Noël Coulet
Né le 4 octobre 1932 à Cogolin (Var), décédé à l’âge de 90 ans le 15 janvier 2023 à Aix-en-Provence (Bouches-du-Rhône), Noël Coulet est resté attaché au long de son existence à la Provence et à la ville d’Aix.
Après une « khâgne » au Lycée Thiers de Marseille et des études continuées à la Faculté des Lettres d’Aix-en-Provence, il était brillamment reçu à l’agrégation d’histoire en 1956. Il obtenait un premier poste au lycée de Tournon (Ardèche), mais il rejoignait dès la rentrée de 1957 le lycée Mignet d’Aix. À compter de 1960, sa carrière se développait à l’université de Provence. D’abord chargé de cours, il devint assistant en 1963, maître-assistant en 1968, chargé d’enseignement en 1971, professeur en 1980. Il dirigeait de longues années le Département d’histoire. Il participait encore à l’UMR TELEMMe depuis sa fondation (1994), avec une vraie présence jusqu’à sa dernière année. De fait, devenu professeur émérite en 1998, il demeurait toujours aussi dynamique au service de la vie universitaire. Juste reconnaissance d’une inlassable activité scientifique et pédagogique, il était promu chevalier des palmes académiques en 1985 et officier en 1992.
Depuis ses études, sa formation et sa maturation intellectuelles ne se séparèrent pas des amitiés et des échanges noués avec les historiens majeurs qui, d’une manière ou de l’autre, touchèrent à l’espace provençal, tels Maurice Agulhon, Jacques Le Goff, Michel Vovelle et Georges Duby, son directeur de thèse.
Noël Coulet soutint cette thèse d’État devant l’Université de Provence, en 1979, sous le titre : Aix-en-Provence, espace et relations d’une capitale (milieu XIVe s.-milieu XVe s.). La qualité du mémoire permit son édition quasi intégrale aux PUP en 1988. Il ne s’agissait pas d’érudition locale, au sens étroit du terme, mais d’un modèle historiographique qui fit école. Il se distingua comme une référence entre les thèses d’histoire urbaine, qui se multipliaient alors.
L’ouvrage illustrait bien sûr la dimension première des travaux de Noël Coulet, savoir l’économie et la société en Provence sur la fin du Moyen Âge. Dans ce registre, des publications nombreuses devançaient la thèse puis continuaient ses pistes. Elles les étendaient plutôt à l’ensemble du comté, en allant des cités du bas pays à l’économie alpine. Noël Coulet établissait ainsi les temps et les modalités de l’essor d’une grande transhumance, entre autres dans une étude qui fit date : « Sources et aspects de la transhumance des ovins en Provence au bas Moyen Âge », dans Le monde alpin et rhodanien, 6 (1978), p. 213-247.
Une place spéciale doit se reconnaître aux enquêtes novatrices, menées en une vingtaine d’articles, sur le judaïsme provençal. La dernière publication du regretté maître porta d’ailleurs sur cet objet : « Dayas Quinoni, la Peste noire et la tallia judeorum », dans Revues des études juives, 181 (2022), p. 159-184. Au long de ses contributions, il démontra, au premier chef, la longue coexistence de la communauté juive avec la société chrétienne.
Les curiosités de Noël Coulet furent au vrai trop nombreuses pour les énumérer. Ajoutons seulement qu’elles dépassèrent de beaucoup le socio-économique, pour toucher au politique, à l’administration, à la religion, aux croyances et aux expressions culturelles. Il ouvrit par exemple le champ à l’étude des rituels politiques, telles les entrées royales dans les villes de Provence, entre XIVe et XVe siècle. L’intérêt de Noël Coulet pour les idéologies et les représentations, entre Moyen Âge et Temps modernes, se trouve heureusement condensé dans un recueil assez récent de ses études principales en ces matières : Rites, histoires et mythes de Provence, PUP, Aix-en-Provence, 2012.
En parallèle aux recherches érudites, Noël Coulet contribua à des synthèses majeures sur la Provence. Avec Maurice Agulhon, il rédigea L’histoire de la Provence pour la collection « Que sais-je ? » (n° 149, dernière édition en 2018). Il écrivit, avec Martin Aurell et Jean-Paul Boyer, La Provence au Moyen Âge, titre paru aux PUP en 2005. Avec Florian Mazel, il dirigea enfin une Histoire d’Aix-en-Provence, parue aux PUR en 2020.
Pour Noël Coulet, l’histoire provençale ne devait pas cependant se fermer sur elle-même. Il se penchait sur les relations avec l’Italie, comme il intégrait la Provence à l’ensemble des domaines dits « angevins », ceux des deux dynasties des rois capétiens de Sicile-Naples.
Dès 1982, il donnait avec Alice Planche et Françoise Robin un ouvrage sur Le roi René (Aix-en-Provence, Édisud). Vers la même époque, il se penchait sur l’immigration italienne, spécialement, piémontaise. Citons : « Mutations de l’immigration italienne en basse Provence occidentale à la fin du Moyen Âge », dans Strutture familiari, epidemie, migrazioni nell’Italia medievale, Naples, 1984, p. 439-510. Puis, il découvrait, éditait et interprétait un remarquable dossier qui illustrait encore les liens entre Provence et Italie : Affaires d’argent et affaires de famille en haute Provence au XIVe siècle, le dossier du procès de Sybille de Cabris contre Matteo Villani et la compagnie des Buonnacorsi, Rome, 1992 (Collection de l’École française de Rome, 158). À partir de 1995, il participait au renouveau des études angevines. Il tenait un rôle de premier plan dans la dense série de colloques, organisés au premier chef par l’École française de Rome, qui relançaient cette historiographie angevine.
Enfin, Noël Coulet ne se limitait pas à la Provence. Son intérêt pour l’histoire religieuse en faisait le spécialiste européen des visites pastorales dans l’Occident chrétien. Signalons en particulier : Les visites Pastorales (Typologie des sources du Moyen Âge occidental, 23, Brépols, 1977, mise à jour en 1985).
Ce résumé, aussi rapide soit-il, laisse comprendre les orientations méthodologiques de Noël Coulet. Sa priorité initiale était la quête des sources, leur transcription et leur examen. Il conviendrait de parler même d’humilité devant les sources. Cette position épistémologique signifiait le refus de l’esprit de système, de la confusion à bien regarder entre interprétations philosophiques du monde et histoire. L’horizon d’une telle démarche était donc la priorité de la vérité. De là découlait la liberté d’esprit pour poser question à tout, pour recevoir tout ce que les sources enseignaient. Au bilan, le passé n’en devenait pas moins utile au présent. Il apprenait à se méfier des permanences, par exemple dans l’habitat ou dans l’économie rurale. Il rendait pourtant conscient du profond substrat sur lequel reposaient les sociétés, tel ce milieu provençal auquel Noël Coulet était tant attaché. Or, son approche des mondes anciens lui survit.
En effet, le professeur, au sens propre, avait autant d’importance chez lui que le savant. Il laisse une cohorte d’élèves, et de disciples, pour prolonger son œuvre. Chacun d’eux témoignera de son dévouement pour soutenir les efforts des étudiants et des jeunes chercheurs. Dans ce cadre, il développa ainsi une relation privilégiée avec les universitaires canadiens, dont plusieurs comptent parmi les meilleurs médiévistes du moment. Il faudrait pouvoir inventorier les séminaires qu’il assura, les maîtrises et thèses qu’il dirigea, les HDR qu’il guida, pour ne pas parler des jurys auxquels il participa. Disons-le, la tâche est impossible.
Ce dévouement était au reste une facette de son souci de soutenir les entreprises collectives. Le simple survol de sa bibliographie a déjà averti de cette disposition. Il faudrait ajouter les livres dont il accepta la direction. Il venait de conclure, à la veille de sa mort, la supervision des Mélanges en l’honneur d’Élisabeth Sauze (Provence historique, fasc. 272, 2022). Dans des années récentes encore, sa vaste science avait apporté une contribution constante et opportune à l’édition, sous la direction de Thierry Pécout, des grandes enquêtes comtales ordonnées par les rois « angevins » : celle de 1297-1299 et celle de 1331-1334 (soit dix volumes publiés par le CTHS, en 2008-2018).
Le sens exceptionnel du bien commun, chez Noël Coulet, se distinguait également dans la direction de la revue Provence historique. Il en assurait la conduite depuis 1980, et le jour même de son décès il s’astreignait encore à cette tâche. Avec lui, Provence historique devint au reste l’une des revues savantes les plus estimées de l’Université française.
L’humanisme de Noël Coulet s’étendait à la sphère privée, à son engagement dans la Fédération protestante de France. Il en présida le forum des relations œcuméniques, de façon fort significative de son ouverture vers les autres. Il en présida encore la commission académique et l’Institut de théologie. L’on trouvera d’ailleurs une excellente notice sur le regretté professeur, due à Régis Bertrand, dans le Dictionnaire biographique des protestants français, dir. P. Cabanel et A. Encrevé, Paris, 2015, p. 757.
C’est assurément une perte immense que viennent de subir ses élèves et l’Université française aux côtés de sa famille, dont nous partageons la douleur.
Gérard Chastagnaret
Noël Coulet
Je n’ai pas été élève de Noël Coulet, je ne suis pas médiéviste, et j’ai peu publié dans Provence Historique : deux articles seulement dont un osait reprendre le titre d’un western de Sergio Leone pour analyser la conduite de trois hommes d’affaires marseillais lors du soulèvement de Carthagène de 1873. Noël Coulet avait eu l’indulgence d’accepter l’anachronisme et la provocation. Tout cela ne me donne qu’une faible légitimité pour évoquer sa mémoire. Néanmoins, j’ai été son collègue et je peux porter témoignage sur des aspects peu connus de son action. Pour beaucoup, la figure du professeur Coulet se limite à celle, déjà remarquable, du disciple de Georges Duby, de l’éminent spécialiste, au rayonnement international, qui a renouvelé et enrichi l’histoire d’Aix en Provence à la fin du Moyen Âge, de l’enseignant respecté, du membre de jury rigoureux, parfois redouté, de l’homme d’une courtoisie parfaite envers chacun, à l’humour discret mais ravageur, sur la grande ville voisine rabaissée au rang de banlieue d’Aix ou sur nos frères inférieurs – chacun reconnaîtra de qui il parlait.
Noël était tout cela, et beaucoup plus aussi. Sans jamais se mettre en avant, il avait une vraie conscience de notre responsabilité devant les générations à venir et il l’a manifesté de plusieurs manières. Il a pris en charge pendant des années, avec Marie-France, jusqu’à l’épuisement, l’accueil d’étudiants dans l’appartement légué à cette intention par Paul-Albert Février. Il a dirigé, avec une bienveillance jamais en défaut, les travaux de plusieurs jeunes chercheuses et chercheurs qui occupent aujourd’hui des postes de professeur, à Aix ou dans d’autres universités.
Il s’est engagé aussi sur d’autres terrains, le recrutement des enseignants et l’organisation de la recherche à la Faculté des Lettres. Noël n’a jamais pris de position publique forte, mais il était homme de convictions, de cohérence et d’engagement. Une fois sûr de son choix, toujours fondé sur le refus de la médiocrité et sur le sens de l’intérêt général, il ne changeait plus, à la différence de bien d’autres, à l’université ou ailleurs. Ses prises de position n’étaient jamais tonitruantes, mais elles étaient définitives. Nous avons eu une complicité discrète, souvent implicite ; nous avons mené plusieurs combats ; nous en avons perdu certains. De médiocres manœuvres et, plus encore, le manque de courage de quelques uns, nous ont ainsi empêché d’élire un médiéviste déjà éminent, aujourd’hui membre de l’Institut. Nous en avons gagné aussi, lors de séances pendant lesquelles Noël Coulet, le verbe aussi acéré que le regard, pouvait lâcher des formules définitives. Ainsi, après le passage d’un candidat qui avait élevé la présentation de ses travaux à l’art du boniment de foire : « nous n’allons pas élire un marchand de casquettes ». J’ai moi-même fait les frais de sa lucidité et de sa concision ravageuse. Ma demande de changement de grade avait été rejetée par l’université. Noël Coulet est venu me voir quelques jours après. Il m’apprit qu’il avait été rapporteur de mon dossier et qu’il avait donné un avis défavorable, en ajoutant : « Gérard, on ne comprend rien à ce que vous faites ». Une parole sans détour, mais une leçon efficace de communication institutionnelle.
Un mot enfin sur un apport, discret mais fondamental de Noël Coulet dans la construction d’une organisation forte de la recherche dans nos disciplines. Au début des années 1990, peu de collègues percevaient la faiblesse de l’état des lieux : de petits centres de recherche par discipline ou même sous-discipline, temporairement rassemblés dans un groupement de recherche du CNRS qui n’avait pas le statut d’un laboratoire et ne pouvait avoir qu’une durée limitée. Cette situation convenait à certains : une forme de labellisation et des crédits a minima en échange de la conservation du pouvoir sur de micro-fiefs disciplinaires. Noël Coulet aurait pu être de ceux-là, au nom de la vitalité et surtout de l’identité affirmée d’un médiévisme local héritier de Georges Duby. Porteur du projet de création d’une unité ample et forte associée au CNRS, j’ai redouté un temps, sans le dire, sa prise de position. Une crainte infondée. Au début des années 1990, Noël Coulet fut un des soutiens les plus durables, et les plus fiables au projet d’une unité rassembleuse. Ce fut décisif pour bloquer la direction du CNRS, dont la doctrine officielle, heureusement volatile, fut un temps celle d’unités fragmentées, contresens scientifique et raté assuré, peut-être discrètement voulu. C’est dire combien l’appui, sans aucune faiblesse, de Noël Coulet au projet initial fut décisif dans la création de l’UMR TELEMMe.
Noël Coulet était un grand médiéviste, mais il ne s’est jamais replié sur le pré carré de sa discipline. Il savait voir loin, anticiper les changements, tout simplement penser le temps, percevoir ses opportunités comme ses contraintes. Il fut un acteur, discret et efficace et, sans doute sans l’avoir voulu, il reste un modèle de droiture et d’intelligence universitaires.