Mathilde Mougin
De l’expérience des corps à la fabrique d’une « science » de l’homme : discours pré-anthropologiques dans la littérature de voyage (1578-1721)
Thèse de en Histoire
Sous la direction de Anne Carol et de Sylvie Requemora-Gros
Soutenue le 21/12/2023
Mots clés : récits de voyage, XVIIe siècle, corps
Résumé :
Le corps est au cœur du récit de voyage, par l’expérience inédite que le voyageur fait de son propre corps, exposé à de nouvelles sensations, mais aussi par l’expérience qu’il fait du corps de l’autre. Les corps rencontrés sont en effet l’occasion pour le voyageur de la découverte de nouveaux usages, d’une nouvelle culture et d’un décentrement de soi. Dans le récit de leur expérience, les voyageurs sont conduits à affirmer ou à infirmer, dans l’acte de l’écriture, certaines de leurs certitudes, notamment à propos de l’homme, de son fonctionnement et de son essence. C’est ce dernier point, à savoir la conception de l’homme sensible dans les récits de voyage – conception que l’expérience de la nouveauté et la découverte de sociétés inconnues contribuent à modifier – que nous souhaitons plus particulièrement interroger. En d’autres termes, il convient d’interroger l’anthropologie à l’œuvre dans les récits des voyageurs, comprise dans une acception générale de « définition du genre humain ». C’est cette conception de l’homme, nourrie de références médicales, théologiques ou encore philosophiques, qu’il s’agit de dégager et, dans la mesure du possible, de systématiser. L’expérience physique du voyage, en ce qu’elle conduit à une redécouverte de soi et de l’autre dont la mise en discours témoigne d’une certaine conception de l’homme, paraît donc être un moyen légitime d’engager une réflexion sur l’anthropologie contemporaine des voyageurs. Le corpus d’étude retenu est constitué de récits de voyage de langue française de la fin du XVIe siècle et du XVIIe siècle, comprenant des récits effectués en Amérique (Jean de Léry, Marc Lescarbot), en Orient (Robert Challe, Jean-Baptiste Tavernier, François Bernier, Pierre-Martin de La Martinière), ainsi qu’en Europe (Montaigne). Ce corpus intègre également des gravures (Théodore de Bry) et des cartes (Atlas de Blaeu).