Julien Saint Roman
Le geste et la révolution.Pratiques sociales et modernité politique des ouvriers de l’arsenal de Toulon (vers 1760-vers1815)
Thèse de Doctorat en Histoire et humanités
Sous la direction de Christine Peyrard
Soutenue le 07/11/2014 à MMSH5 rue du chateau de l'horloge Salle de cours n°3
Membres du jury :
Composé de M. CROOK Malcolm Professeur des Universités, Mme MAITTE Corine Professeur des Universités, Mme MARIN Brigitte Professeur des Universités, Mme PEYRARD Christine Professeur des Universités, M. VOVELLE Michel Professeur des Universités.
Mention : Très honorable avec félicitations
Mots clés : ouvriers, arsenal, classe, Révolution française, Toulon, Histoire sociale, Histoire maritime
Résumé :
Ce travail porte sur les pratiques sociales et la politisation des ouvriers de l’arsenal de Toulon à la fin de l’époque moderne et durant la Révolution française, pour comprendre, par « en bas », comment naît un collectif nouveau : la classe sociale. Cette étude s’appuie sur des archives peu ou pas utilisées en histoire navale. Les sources médicales, judiciaires et notariées, sans négliger les correspondances officielles et les registres matriculaires ou cadastraux, permettent de découvrir toutes les dimensions, individuelles et collectives, des comportements quotidiens des travailleurs toulonnais. À partir des années 1760, les nouveaux rapports d’autorité dus à l’apparition du contremaître et de l’ingénieur, et la mise en œuvre du libéralisme économique obligent les ouvriers à reformuler les contours de leur identité laborieuse basée sur les routines des chantiers et les expériences en mer. En revanche, la forte proportion de Méridionaux, la puissante reproduction sociale et la ségrégation socio-spatiale à l’intérieur de la ville perpétuent la dimension communautaire des ouvriers de l’arsenal. C’est dans le champ politique, au cours de la Révolution, que leurs pratiques et leurs représentations sont le plus profondément bouleversées. Ils participent alors à l’organisation du port, s’approprient les sections urbaines pour tenir leurs assemblées et accentuent une implication citoyenne par des modes de participation spécifiques qui transforment leur recherche d’économie morale en économie populaire politique. Notre thèse montre donc que la Révolution française a permis la constitution d’un collectif prolétaire et son insertion dans le monde contemporain des luttes sociales.
Keywords : workers, toulon, revolution, navy,
Abstract :
This study focuses on the social practices and politicization of the dockyard workers of Toulon, at the end of the early modern period and during the French Revolution, in order to understand, ‘from below’, how a new social identity was forged, based on class. The investigation relies upon archival material which has been little used, or not at all, in the exploration of naval history. The accompanying analysis of medical, judicial and notarial sources, without neglecting official correspondence, employment records and the land registry, has enabled the author to uncover all aspects, both individual and collective, of the daily behaviour of workers at the arsenal of Toulon. From the 1760s onwards, new relationships with the naval authorities, as a result of the appearance of foremen and engineers, as well as the advent of economic liberalism, obliged these workers to refashion the contours of their working identity, which was based on the routines of the shipyards and their experience at sea. By contrast, the high proportion of southerners in the labour force, the family tradition of employment at the arsenal and social segregation in the town, all served to preserve the communal spirit of the dockyard workers. It was in the political domain, during the Revolution, that their practices and identity were subject to the most profound upheaval. They began to participate in the way that the naval port was organized, used the urban sections to hold their own meetings, and underlined their role as citizens by adopting specific forms of activity that transformed their quest for a moral economy into a popular political economy. This thesis thus demonstrates that the French Revolution facilitated the establishment of a collective proletarian identity and led to its integration into the modern world of social conflict.