Transition énergétique et reconfiguration des territoires

Dans le contexte du changement climatique et de la volonté de réduire les émissions de GES issues d’un système largement dominé par les énergies fossiles, la transition énergétique peut apparaître comme un discours relativement consensuel dans les sphères politiques, économiques et médiatiques en Europe. Mais elle est aussi un concept contesté dans les sphères climato-septiques, comme en atteste la sortie des États-Unis des accords de Paris. Des divergences persistent également quant à la définition concrète de son contenu  (Hourcade et Van Neste, 2019). Ses objectifs diffèrent : allant du maintien de la société d’abondance actuelle, jusqu’à la décroissance par la sobriété énergétique (Aykut et Evrard, 2017 ; Parrique, 2022). Par ailleurs, les approches sociotechniques qui entretiennent un rapport rétroactif entre dimension technique et sociale Simondon, 1958 ; Akrich, 1989) sont désormais insuffisantes pour prendre en compte les questions environnementales et la réalité des socio-écosystèmes. Au-delà des débats théoriques, il nous semble essentiel d’être attentifs aux processus de territorialisation de la transition (Duran, 2020), à savoir son inscription dans des territoires concrets (Mattina et al., 2023 ; Meyer et Weber, 2024), dans la mesure où elle met en tension « des enjeux globaux, dont les références sont a-territoriales, et les enjeux locaux encastrés dans des systèmes d’action établis » (Bombenger, Larrue, 2014).

Le programme ENERGON soutenu par le labex DRIIHM de 2022 à 2024, nous a permis d’interroger les reconfigurations territoriales de six Observatoires Hommes-Milieux en France et en Amérique du Nord. Ces cas d’étude (Daviet, Barthelemy et al, 2024) ont constitué des laboratoires permettant de mettre à l’épreuve la notion de nexus entre société, technologie et environnement. A l’image du « Water-Food-Energy nexus » (Urbinatti et al., 2020), envisager les transitions énergétiques comme un nexus « Société-Technique-Environnement » amène à accepter qu’une action sur l’une de ses composantes ait un impact sur les deux autres. En ce sens, l’approche par les nexus (définis en tant que liens, interrelations) permet de « casser les silos disciplinaires » (Cairns et Krzywoszynka, 2016) pour élaborer une méthodologie intégrée, adaptée à l’échelle territoriale, aux matérialités de la transition (Forget, Bos, Carrizo, 2021), et aux flux de ressources (métabolisme territorial). Cela permet d’évaluer les conséquences des transitions énergétiques sur les socio-écosystèmes (Cumming et Collier, 2005 ; Ostrom, 2007).

Les reconfigurations techniques renvoient aux mutations des systèmes énergétiques et aux processus de décarbonation (dans un continuum production/transport/usage). Les reconfigurations sociétales, au sens large, comprennent les réseaux d’acteurs publics et privés (Velut, Ghorra Gobin, 2006 ; Perrin & Bouisset, 2022), les politiques publiques, les modèles économiques. Les reconfigurations environnementales comprennent la redistribution des espaces et de leur usage, les mutations paysagères, la pression sur les ressources et plus généralement la recomposition des milieux. Chaque composante (technique, sociétale environnementale) a ses temporalités et rencontre des freins, des impulsions, des effets de seuil ; d’où des crises qui sont des moments de tension et de déséquilibres.

Le présent colloque ambitionne l’analyse d’un large panel d’exemples territoriaux afin de mieux appréhender les modalités de leurs reconfigurations. Parmi ces modalités, quelques questions clés :

  • Est-ce que ces reconfigurations s’effectuent dans des contextes conflictuels ou consensuels, quelles sont les modalités de concertation et de débat public ?
  • Ces reconfigurations manifestent-elles une dépendance au sentier ou une capacité à créer de nouveaux chemins via des dynamiques d’innovation ?
  • Les rapports entre enjeu climatique et biodiversité présentent-ils des synergies ou s’avèrent-ils plus complexes ? Comment se pose la question des ressources ?
  • Quid de la reconfiguration de l’échelle de gouvernance et de fonctionnement des systèmes énergétiques ? Quelles articulations entre local et régional ?

En explorant ces questions, le colloque cherche à appréhender la transformation des systèmes énergétiques, dans un contexte de territorialisation des politiques publiques et dans une perspective de durabilité réaliste.

  • Inscription : https://energon2025.sciencesconf.org/
  • Contact : energon2025@sciencesconf.org

Programme détaillé

ENERGON